Temps de lecture : 2mn15

Hello,

On s’est déjà tous dit qu’on allait se faire remplacer par l’IA.
Pourtant, elle aurait pour but de nous permettre de faire mieux.

En pratique, qui bénéficie de cette révolution ?
Allons-nous vers un renforcement des inégalités, ou vers une démocratisation de la tech ?

On analyse tout ça ensemble.

Théo

Focus : L’IA, nouvel ascenseur social ?

Grâce à l’IA, nous avons un assistant 24h/24 pour répondre à nos questions, nous former à de nouvelles compétences ou nous aider à rédiger notre CV.

L’expertise à portée de tous, en quelques clics.
Mais cette promesse tient-elle vraiment ses engagements ?

Un paradoxe troublant émerge : loin de combler les écarts, l’IA risque d’élargir le fossé entre ceux qui maîtrisent ces nouveaux outils et les autres.

Que ce soit en France, en Europe ou dans le monde.

À suivre :

  • L’IA est-elle vraiment pour tous ?

  • Peut-elle vraiment démocratiser le savoir ?

  • La politique, enjeu majeur du débat.

L’IA pour tous ?

En France, l’essor des IA, notamment des IA génératives comme ChatGPT, est rapide.

En 2025, une enquête révèle que 86 % des Français ont entendu parler de ces outils (contre 78 % en 2024), et près de 45 % les utilisent quotidiennement.

Des usages variés facilitent la vie de chacun.

Recherche d’informations (34 % des utilisateurs), gain de temps dans les tâches (28 %), correction d’orthographe (23 %) et même aide pour la créativité ou la confiance en soi.

Preuve de cette popularité grandissante, ChatGPT est devenu l’outil privilégié de 72 % des utilisateurs d’IA en France.

On parle même de l’IA comme du « nouvel agent de voyage » : 76 % des Français envisagent de s’en servir pour organiser leurs congés d’été.

Mais derrière l’engouement, toutes les catégories de la population ne profitent pas de l’IA de la même manière.

L’étude Ifop/Talan met en lumière des fractures numériques persistantes.
D’abord, un décalage entre générations.

Les jeunes sont largement en avance : 85 % des 18-24 ans utilisent les IA génératives alors que seulement 31 % des 35 ans et plus s’y sont mis.

Ensuite, une fracture territoriale.

L’Île-de-France concentre le plus d’adeptes (59 % des habitants utilisent ces IA), contre seulement 34 % dans les communes rurales.

Donc selon l’âge ou le lieu de vie, l’accès à l’IA n’est pas le même.

Mais ça va encore plus loin.
Il ne suffit pas d’avoir Internet pour bénéficier de l’IA : il faut aussi savoir l’utiliser.

Or, 73 % des Français estiment ne pas avoir les connaissances suffisantes pour exploiter ces technologies.

Ce manque de culture numérique rejoint un constat plus large : 31,5 % de la population, soit 16 millions de personnes, se considère « éloignée du numérique ».

Parmi elles, on compte des personnes âgées ou peu diplômées, mais aussi un jeune sur cinq de moins de 25 ans.

Comme quoi, la jeunesse n’est peut-être si “connectée” qu’on ne le pense.
Et pour tous ces publics, l’IA peut devenir un facteur d’exclusion supplémentaire.

Le pire, c’est que cette situation n’est pas propre à la France.
En Europe, on observe également un usage de l’IA à plusieurs vitesses.

La barrière de la langue en est un exemple.

La plupart des IA ont été entraînées en anglais, et les locuteurs de langues peu diffusées en ligne peuvent se sentir laissés pour compte.

Comme le souligne l’UNESCO, les systèmes d’IA actuels intègrent des biais et les contenus en ligne ne représentent pas équitablement toutes les langues et cultures.

Mais des initiatives émergent pour y remédier.

Un collectif international de chercheurs, piloté en partie par la France, a développé BLOOM, un modèle open-source capable de générer du texte dans 46 langues.

Il inclut même une vingtaine de langues africaines, d’ordinaire peu présentes dans les données.

Le but ?
Rendre l’IA plus inclusive en élargissant son champ linguistique et culturel.

Parce que quand on dézoome encore à l’échelle mondiale, la fracture est d’autant plus visible.

En 2024, environ 68 % de la population mondiale est connectée à Internet, ce qui signifie que 2,6 milliards de personnes restent hors ligne.

L’accès aux outils numériques reste étroitement lié au niveau de développement économique.

Dans les pays riches, 93 % de la population utilise Internet, contre seulement 27 % dans les pays à faible revenu.

En Afrique subsaharienne, moins de 40 % des habitants sont connectés, et dans certaines zones rurales d’Afrique de l’Ouest ou centrale, le taux tombe sous les 20 %.

Le coût élevé des données mobiles (plusieurs dollars par gigaoctet dans certains pays africains) aggrave ce fossé.

Une grande partie de la population des pays émergents risque d’être exclue des opportunités économiques générées par l’IA.

L’UNESCO met en garde elle aussi contre ces risques d’inégalités amplifiés.

Les biais et limites de l’IA s’ajoutent aux inégalités existantes, causant un préjudice supplémentaire à des groupes déjà marginalisés.

Sauf que si on arrive à résoudre ces problèmes, les perspectives sont folles pour justement s’attaquer aux inégalités.

Vers la démocratisation du savoir ?

L’exemple de l’éducation est parlant.

Focus, un professeur virtuel au Nigéria, est un projet mené en 2024 à Benin City.
Ils ont testé un chatbot éducatif basé sur GPT-4 auprès de collégiens de 11-12 ans.

Problème : des classes surchargées, peu de manuels, une connexion Internet instable et des pannes d’électricité fréquentes.

Malgré tout, des binômes d’élèves disposant chacun d’un ordinateur ont suivi, après l’école, douze séances de 90 minutes en dialoguant avec l’IA.

Ils étaient supervisés par des enseignants formés quelques jours avant.
Et les résultats ont dépassé les attentes.

En six semaines, les élèves ayant bénéficié de ce tuteur virtuel ont amélioré leurs performances en anglais d’un tiers d’écart-type par rapport au groupe témoin.

Un progrès équivalent à celui d’un tutorat individuel humain.

Mieux encore, ces élèves ont aussi obtenu de meilleures notes aux examens de fin d’année dans toutes les matières.

L’IA n’a pas seulement renforcé leur anglais, elle leur a redonné confiance et permis des acquis qui ont profité au reste de leur scolarité.

Cet exemple illustre le potentiel de l’IA éducative comme “ascenseur scolaire”.

Surtout dans les pays où le manque d’enseignants et de ressources creuse l’écart de niveau entre élèves.

La Banque Mondiale estime que 70 % des enfants de 10 ans dans les pays à revenu faible et intermédiaire n’atteignent pas les compétences de base en lecture.

L’IA pourrait pallier ces besoins, et donner à tous ces enfants l’éducation qu’ils méritent.

La clé, toutefois, est le bon encadrement humain et éthique.
En Europe, la Commission européenne cherche à l’appliquer.

Dès 2022, elle a publié des lignes directrices éthiques sur l’usage de l’IA et des données dans l’éducation, à destination des enseignants européens.

Ces recommandations visent à aider les profs à utiliser l’IA en classe, tout en sensibilisant aux risques.

En France, le ministère de l’Éducation nationale travaille à définir un cadre pour intégrer l’IA dans les programmes scolaires sans exacerber les inégalités entre établissements.

Apprendre à se servir intelligemment de l’IA pourrait bientôt faire partie des compétences de base enseignées à l’école.

La politique s’en mêle

Face à ces constats, politiques publiques et acteurs privés commencent à se mobiliser pour que l’IA soit un outil d’égalité des chances plutôt qu’un facteur de division.

En France, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a tiré la sonnette d’alarme en 2025.

Il faut impérativement éviter que l’IA ne renforce la fracture numérique.

Le CESE recommande de lancer un grand plan de formation aux compétences numériques et à l’IA, dans l’Éducation nationale, les entreprises et les secteurs associatifs.

Parallèlement, le rapport préconise de garantir un “droit au non-numérique” dans les services publics.

En clair, même si l’administration utilise de plus en plus des chatbots ou des plateformes en ligne intelligentes, aucun usager ne devrait être laissé de côté.

Chacun doit pouvoir, s’il le souhaite, accéder à un humain pour accomplir ses démarches.

Au niveau européen, des appels à projets ont été lancés pour développer des solutions d’IA générative spécialement conçues pour la formation des citoyens.

L’idée est de créer un écosystème où start-ups, universités et écoles travaillent main dans la main pour que les avancées de l’IA profitent au plus grand nombre.

Enfin, les entreprises elles-mêmes jouent un rôle.

Ces centres de formation gratuits ont permis de former 900 000 personnes aux compétences numériques.

D’autres entreprises ou associations proposent des MOOC et des cours en ligne d’initiation à l’IA pour le grand public.

On voit également se multiplier les hackathons et concours d’IA ouverte, où des jeunes de milieux divers peuvent apprendre en pratiquant.

Sur la scène internationale, l’ONU et l’UNESCO appellent à une coopération mondiale pour éviter un monde à deux vitesses.

L’UNESCO a ainsi fait adopter en 2021 une Recommandation sur l’éthique de l’IA par l’ensemble de ses États membres.

Objectif : poser des principes de transparence et d’équité.
Par exemple en soutenant les langues locales dans les technologies.

De l’autre côté du globe, l’Inde a lancé un programme bilingue d’assistants IA pour aider les agriculteurs en zones rurales à obtenir des informations en langue locale.

Plusieurs pays africains intègrent l’IA dans leurs stratégies d’éducation numérique pour rattraper le retard de connectivité.

Ces efforts restent encore inégaux, mais ils montrent une prise de conscience.

Plus que jamais, il faut investir dans les compétences numériques de base, l’accès aux infrastructures, la variété culturelle des contenus, et la lutte contre les biais techniques.

Parce qu’en rebattant les cartes, l’IA peut aussi bousculer les hiérarchies établies.

L’IA vous paraît-elle être un risque de fracture sociale supplémentaire ?

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PS : Cette newsletter a été écrite à 100% par un humain. Ok, peut-être 80%.

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